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1) Perspectives et évolution

C’est le plus petit élément chimique, celui apparu juste après le Big Bang. L’hydrogène est présent en grande quantité sur Terre, mais il est souvent lié à d’autres molécules, notamment avec l’oxygène pour former l’eau (d’où son nom). Cependant, il est très rare sous sa forme gazeuse, le dihydrogène, qui nous intéresse pour les applications industrielles. Actuellement, un seul petit gisement est exploité au Mali. En Europe, l’évaluation des stocks présents dans les roches fait débat. De plus, l’impact environnemental lié à son extraction et à sa purification reste inconnu. Cette forme naturelle d’hydrogène est aussi appelée hydrogène blanc.

C’est pourquoi, pour l’instant, il est produit en grande quantité, notamment à partir de gaz naturel (technique du reformage du méthane à la vapeur), pour des usages variés : raffinage de produits pétroliers, synthèse de l’ammoniac destiné à l’industrie des engrais, réduction du minerai de fer. Cet hydrogène est très carboné, émettant 11 tonnes de CO₂ par tonne produite, et représente 95 % du volume d’hydrogène produit dans le monde. On le qualifie d’hydrogène gris. Il devient bleu lorsque le CO₂ émis lors de sa production est capté, réduisant ainsi son facteur d’émission.

En tant que vecteur énergétique, l’hydrogène vert suscite un intérêt croissant pour décarboner des secteurs difficiles à électrifier. Cet hydrogène est produit par électrolyse de l’eau alimentée par des énergies renouvelables. Toutefois, des défis majeurs persistent concernant sa production, son stockage et son utilisation.

2) Défis liés à la production d’hydrogène vert

Le premier défi consiste à produire de l’hydrogène vert à échelle industrielle. L’électrolyse alcaline, seul procédé de production décarboné d’hydrogène, a deux faiblesses notables :

Rendement énergétique : environ 30 % de l’énergie électrique est perdue lors de la conversion en hydrogène. Il faudra rajouter encore 10 % de pertes pour le stockage et 30 % de pertes si l’on retransforme l’hydrogène en énergie électrique. Ce vecteur énergétique est donc intéressant uniquement pour valoriser des surplus ponctuels d’électricité qui seraient de toute façon perdus, comme dans le cas des sources d’énergie renouvelable intermittente. Cette stratégie d’utilisation énergétique est appelée Power-to-Gas.

Inertie des électrolyseurs : Le temps nécessaire à un électrolyseur pour atteindre son plein régime rend paradoxalement la technologie peu adaptée aux sources d’énergie intermittentes. Pour pallier ce problème, deux nouvelles technologies émergent :

La membrane échangeuse de protons (PEM) : Constituée de polymères, elle joue le rôle d’électrolyte et sépare l’oxygène de l’hydrogène. Elle atteint rapidement son plein régime. En 2021, Air Liquide a installé au Québec un site utilisant cette technologie, capable de produire 8 tonnes de H₂ par jour grâce à l’électricité hydraulique.

L’électrolyse à oxyde solide (SOEC) : Fonctionnant à haute température (600-800 °C), elle est plus rapide qu’un électrolyseur alcalin, mais pertinente uniquement en présence d’une source de chaleur non valorisée à proximité.

Quel que soit le procédé, les matériaux utilisés (comme l’iridium et le platine) sont coûteux et posent des questions de durabilité d’approvisionnement.  En outre, le vieillissement prématuré des installations, dû aux variations intermittentes des sources d’énergie primaire, reste encore un obstacle majeur.

Décarboner les 95 MT d’hydrogène consommées annuellement dans l’industrie lourde représente déjà un défi conséquent. Si l’on y ajoute de nouveaux usages (transport lourd, carburants de synthèse, mobilité), les besoins, d’après l’AIE, atteindraient 140 MT d’ici 2030, dont 55 MT produites par électrolyse. Ce scénario ne tient toutefois pas compte de l’impact en termes de coût : l’hydrogène vert coûte actuellement entre 3 et 6 €/kg contre 1-2 €/kg pour l’hydrogène gris. Il est donc évident que le développement de la filière hydrogène vert dépendra des régulations du marché.

 

 

3) Stockage et transport de l’hydrogène

Sous forme gazeuse, l’hydrogène est hautement explosif, ce qui rend son transport et son stockage complexes. En raison de sa faible densité, les installations à pression atmosphérique sont volumineuses. Pour résoudre ce problème :

Compression : À très haute pression (350 à 700 bars), cela consomme environ 15 % de l’énergie contenue dans l’hydrogène.

Liquéfaction : Bien que la densité soit multipliée par 800, le processus entraîne une perte énergétique de 30-35 %. Cette méthode est surtout utilisée dans le secteur spatial.

Pour les courtes distances, l’hydrogène liquide est transporté via des conduites isolées. Pour les longues distances, on utilise des camions-citernes cryogéniques ou des bouteilles sous haute pression. Les réservoirs multicouches (fibres de carbone et résines) garantissent étanchéité et rigidité, mais ces équipements restent coûteux.

La recherche explore de nouveaux modes de stockage, comme l’utilisation de matériaux capables d’absorber et de libérer l’hydrogène à température ambiante et sous pression modérée (projet européen Hycare).

4) Applications

À des fins énergétiques, l’hydrogène est utilisé de manière optimale dans les piles à combustible. Bien que cette technologie ait été découverte au XIXᵉ siècle, elle a été éclipsée par le moteur thermique, plus facile d’usage. Aujourd’hui, elles alimentent aussi bien des sites industriels, des bâtiments, des trains que des véhicules légers (Toyota Mirai, Hyundai ix35).

L’enjeu actuel est d’augmenter la durée de vie des piles tout en réduisant les coûts des matériaux. Le cœur technologique repose sur un empilement d’électrodes en platine (29 000 €/kg) et de membranes (à plusieurs centaines d’euros par m²). Une filière de recyclage sera indispensable pour rendre cette technologie viable, durable et abordable.

5) Autre potentiel

Un autre usage de l’hydrogène est la méthanation, consistant à créer du méthane de synthèse à partir de CO₂ ou CO capté, suivant la réaction de Sabatier. Ce procédé présente l’avantage d’utiliser les infrastructures gazières existantes. Toutefois, la conversion entraîne des pertes énergétiques conséquentes, de l’ordre de 50 %.

Conclusion

L’hydrogène, bien que prometteur sur le papier, reste une filière en émergence. Le défi substantiel consiste d’abord à décarboner les usages actuels. Le déploiement à grande échelle repose sur la réussite de la décarbonation de la production d’électricité, les innovations technologiques pour la production, le stockage, les nouveaux moyens d’utilisation, et la mise en place de filières de recyclage adaptées. La maturité de la filière hydrogène arrivera probablement dans les années 2040.

 

Source:

 

IAE global hydrogene review 2023: https://www.iea.org/reports/global-hydrogen-review-2023

https://iea.blob.core.windows.net/assets/deebef5d-0c34-4539-9d0c-10b13d840027/NetZeroby2050-ARoadmapfortheGlobalEnergySector_CORR.pdf

Les dossier de science et avenir n219octobre/ decembre 2024 : Quelle energies pour demain?

https://www.h2-mobile.fr/dossiers/lh2-hydrogene-liquide-definition/

https://demaco-cryogenics.com/fr/cryogenie/tout-sur-lhydrogene-liquide/

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