Dossier Climat : Le Forçage Radiatif et ses Paramètres Influents
En ce début d’année, nous revenons sur un fait marquant de 2024 : pour la première fois, la température mondiale moyenne a dépassé 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle (1850-1900). Ce seuil symbolique constituait jusqu’alors la limite basse de l’Accord de Paris de 2015 et l’objectif le plus ambitieux à l’horizon 2100. Bien que ce dépassement ne signifie pas encore que le climat a franchi ce seuil de manière permanente (il faudrait une moyenne sur 20 ans pour cela), ce constat, seulement 10 ans après la COP 21, est alarmant. Selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM), l’année 2024 a été la plus chaude jamais enregistrée, avec une température moyenne mondiale dépassant de 1,55 °C (±0,13 °C) la moyenne de la période préindustrielle
Nous avons souvent abordé les questions énergétiques, mais peu celles du climat. Cette série d’articles vise à expliquer les concepts fondamentaux du climat. Nous commençons aujourd’hui avec la notion de forçage radiatif et les paramètres qui l’influencent.
1. Qu’est-ce que le climat ?
Le climat correspond à l’étude de la distribution statistique des conditions atmosphériques dans une région et sur une période donnée. Il se distingue de la météorologie, qui concerne l’étude du temps à court terme et sur des zones précises. Nous parlerons ici uniquement de températures moyennes calculées sur 30 ans à l’échelle mondiale.
Sur des échelles de temps longues, la température de la Terre est déterminée par un équilibre délicat entre l’énergie reçue du Soleil et l’énergie renvoyée dans l’espace. Ce système repose sur un phénomène physique fondamental : le bilan radiatif.
2. Notion de bilan radiatif
Le bilan radiatif de la Terre correspond à la différence entre l’énergie solaire entrante et l’énergie sortante. Il détermine si la planète se réchauffe, se refroidit ou reste à une température stable. Voici ses composantes clés :
2.1 Énergie entrante
Le Soleil émet un rayonnement principalement dans le spectre visible, ainsi que des ondes ultraviolettes (UV) et infrarouges (IR).
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2.2 Énergie sortante
La surface de la Terre, chauffée par cette énergie solaire, émet à son tour un rayonnement infrarouge (IR) vers l’espace. Cependant, une partie de ce rayonnement est capturée par des gaz présents dans l’atmosphère, un phénomène appelé effet de serre.
2.3 Bilan global
Ainsi, le forçage radiatif causé par des changements dans la concentration de gaz à effet de serre ou des modifications de l’albédo entraîne directement des changements climatiques.
Le graphique ci dessous illustre les flux d’energies avec leurs valeurs en W/m2
3. Facteurs influençant le forçage radiatif
3.1 L’effet de serre : le rôle des gaz dans la rétention de chaleur
L’effet de serre est un processus naturel où certains gaz atmosphériques absorbent et réémettent le rayonnement infrarouge. Ces gaz incluent principalement :
Ces molécules ont la capacité unique d’absorber les infrarouges grâce à leur structure moléculaire. En vibrant lorsqu’elles interagissent avec ce rayonnement, elles réémettent l’énergie dans toutes les directions, y compris vers la surface terrestre. Cet effet maintient une température moyenne de 15 °C, bien supérieure aux -18 °C qu’aurait la Terre sans ces gaz.
3.2 L’albédo : la réflexion de l’énergie solaire
L’albédo est la capacité de certaines surfaces ou aérosols (particules en suspension dans l’air) à réfléchir l’énergie solaire. D’une manière générale, les surfaces claires (glaces, neiges) ont un albédo élevé, renvoyant une grande partie de l’énergie solaire vers l’espace. Tout le monde a déjà fait l’expérience en été : en portant des vêtements blancs ou noirs, la sensation de chaleur au soleil est beaucoup plus marquée lorsque l’on porte des vêtements sombres.
À noter que lorsque les glaces fondent, elles sont remplacées par des surfaces sombres (océans, terres), qui absorbent davantage de chaleur. Ce processus crée une rétroaction positive amplifiant le réchauffement climatique.
Dans le cas de l’albédo, la boucle de rétroaction fonctionne dans les deux sens. Lors de glaciations, la formation de calottes glaciaires a pour effet d’amplifier la réflexion de l’énergie solaire, refroidissant davantage le climat. On peut notamment citer la glaciation huronienne il y a environ 3 milliards d’années où l’albédo a prolongé la glaciation totale de la Terre pendant 300 millions d’années. Ce n’est qu’après la réémission de gaz à effet de serre liée au volcanisme que la Terre a pu sortir de cette période de glaciation.
4. Autres facteurs ayant une influence locale.
Les gaz à effet de serre et l’albédo sont les deux principaux facteurs influençant la température globale à l’échelle de la Terre. Il existe bien d’autres facteurs, mais leur rôle est soit mineur, soit local, notamment :
Conclusion
La valeur actuelle du forçage radiatif est estimée à 2.7 W/m², constituée de 3.8 W/m² due à l’accroissement des concentrations de gaz à effet de serre et de -1.1 W/m² lié à l’augmentation des aérosols (effet d’albédo). En 2100, le forçage radiatif pourrait atteindre jusqu’à 8.5 W/m² dans le scénario le plus pessimiste. Le GIEC a par ailleurs proposé cinq trajectoires socio-économiques partagées, associées au niveau de forçage radiatif en 2100.
Ainsi, nous avons exploré la notion de forçage radiatif, ses ordres de grandeur et les paramètres qui l’influencent. Comprendre ces mécanismes est essentiel pour appréhender les dynamiques climatiques actuelles et futures. Dans le prochain article, nous nous intéresserons aux gaz à effet de serre, à leur rôle dans ce processus et à leurs cycles de dégradation.
Source :
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